
Patsy Gallant: L’étoffe d’une diva
D’abord membre du groupe Les Sœurs Gallant, la chanteuse Patsy Gallant a bâti sa carrière solo avec des succès comme From New York to L.A. et Sugar Daddy.
Sa contribution à la chanson populaire depuis un demi-siècle et son dévouement auprès d’œuvres sociales lui ont récemment valu une mise en nomination pour recevoir l’Ordre du Canada. Et la reine du disco ne s’assoit pas sur ses lauriers pour autant! Elle nourrit encore une foule de projets et déborde d’une énergie contagieuse.
Vous travaillez présentement sur un nouvel album, Unsung Songs, sur lequel, pour la première fois, vous signez l’ensemble des textes. Quand vous êtes-vous sentie prête à agir en tant qu’auteure?
Ça fait plus de 20 ans que j’ai envie de faire cet album. J’ai écrit ces chansons il y a longtemps, mais je les ai peaufinées et mises au goût du jour. Une des chansons s’intitule Ain’t No Way to Treat a Woman et parle de la condition des femmes. Elle parlait d’une affaire personnelle au départ, mais je l’ai rendue universelle en ajoutant un couplet sur Malala, cette jeune Pakistanaise qui, à 13 ans, a reçu une balle dans la tête parce qu’elle voulait que ses amies puissent aller à l’école. Heureusement, elle a survécu. En 2014, elle a reçu le prix Nobel de la paix. Elle est alors devenue la plus jeune personne à recevoir un prix Nobel. J’ai écrit les paroles et la musique de 125 chansons.
Sur le lot, j’en ai gardé une bonne vingtaine. Personne ne sait que j’écris. Je l’ai caché parce que j’écris surtout en anglais et parce que ce n’est pas du tout le même genre que Sugar Daddy. J’avais peur que les gens n’aiment pas ça. J’ai des choses à dire. J’ai écrit des chansons sur le 11 septembre, sur mon fils, sur ma sœur décédée il y a deux ans. Cet album est mon bébé, avec mes chansons à moi!
Vous avez toujours travaillé à la fois en anglais et en français. Abordez-vous ces deux langues différemment quand vous écrivez?
Je passe d’une langue à l’autre sans même m’en rendre compte. J’écris toutefois plus aisément en anglais. Sur mon nouvel album, j’ai trois chansons en français. D’ailleurs, si je sors un single, ce sera le tango Tu me tues.
Vous avez rendu hommage à Édith Piaf sur votre album Patsy Gallant chante Piaf. Quelle a été l’influence de cette grande chanteuse sur votre carrière?
Cette histoire est incroyable! J’ai chanté en première partie d’Édith Piaf avec Les Sœurs Gallant en 1960. C’était au cabaret À la Porte St-Jean à Québec. À l’époque, ma mère nous suivait, mes sœurs et moi, et on sillonnait les cabarets de la province. J’avais 9-10 ans. On entrait toujours par les cuisines, et un moment donné, on est entrées pendant qu’Édith Piaf répétait. Maman m’a dit, avant que j’aille me cacher dans la loge parce que j’étais trop jeune pour être dans le cabaret, que c’était la grande Édith Piaf qui chantait. Je l’ai écoutée, avant de dire à ma mère: «Elle fausse, la chanteuse! Est-ce que je peux m’en aller dans ma loge maintenant?» Incroyable! Elle me faisait peur, habillée en noir, recroquevillée sur elle-même. C’était deux ans avant son décès. Elle était très malade, sa voix tremblait. Et moi, je voulais juste aller chercher mon May West et mon Pepsi, que ma mère me donnait pour me garder éveillée pendant les trois shows que je devais donner!
On a donc fait la première partie d’Édith Piaf. Bien plus tard, quand j’ai fait un show où j’incarnais Édith Piaf à la Place des Arts, j’ai compris quelle grande chanteuse elle était. On peut d’ailleurs faire un parallèle entre son histoire et la mienne: elle a chanté dans la rue à 10 ans, j’ai travaillé dans les cabarets à 8 ans. On a vu des choses que des enfants de cet âge ne devraient pas voir.
Sugar Daddy est sans doute votre plus grand succès au Québec. Vous souvenez-vous de votre réaction quand vous avez lu le texte pour la première fois?
On ne sait jamais quand une chanson va devenir un grand succès. Parfois, des chansons sonnent tellement bien qu’on ne pense pas aux paroles. D’ailleurs, la définition de sugar daddy n’est pas la même pour tout le monde. Pour plusieurs, il s’agit d’une jeune femme qui fréquente un homme plus vieux et fortuné. Pour d’autres, c’est un trafiquant de cocaïne. Au Mexique, quand la chanson est devenue un hit, les enfants l’appelaient papá de azúcar. Pour eux, c’était un gentil papa, un papa gâteau.
On ne s’attendait pas à ce que Sugar Daddy soit un hit. Ça implique tellement de facteurs: il faut être à la bonne place au bon moment, entouré des bonnes personnes. Imaginez si j’avais un hit à 70 ans, ce serait génial! J’y crois encore.
Vous n’avez jamais arrêté de chanter. Est-ce que votre métier vous passionne autant qu’à vos débuts?
Oui, je suis encore là et je n’ai qu’une envie, c’est de monter sur scène! J’ai encore tellement à donner. J’ai commencé à chanter à 3 ans; ma mère me faisait monter sur la table pour chanter. Je n’avais pas besoin de faire grand-chose, tout le monde est en admiration devant une petite fille de 3 ans qui se donne en spectacle!
Que faites-vous pour garder la forme?
J’ai des petits bobos comme tout le monde, mais je suis très active, je n’arrête jamais. Je fais du ménage, du magasinage, des appels, je m’occupe de ma carrière. J’imagine que c’est ce qui me garde jeune.
Merci pour votre confiance et votre enthousiasme, Madame Gallant!