Une animatrice près de son public

Marie-Claude Barrette est bien plus qu’une animatrice, on a parfois l’impression qu’elle fait partie de la famille !

MCBarette

Très près des gens, elle est à la barre d’émissions qui nous font parfois rire, parfois pleurer, mais toujours réfléchir. Elle le dit elle-même : sa passion, c’est l’humain. Rencontre avec une femme aussi sympathique autour d’un café qu’à la télé!

Dans votre conférence Au rythme de la vie, vous faites une rétrospective des 50 dernières années. Êtes-vous rendue à l’heure des bilans?

Quand j’avais 30 ans, je me souviens m’être dit qu’à 50 ans, j’irais marcher Compostelle. Je ne sais pas si ce sera possible parce qu’il y a des choses dans ma vie qui m’en empêchent présentement, mais pour moi, à 50 ans, il est temps de faire un bilan pour se donner un élan pour le reste de sa vie. Je me suis toujours dit : à 50 ans, je vais faire ce que je veux ! C’est le temps de récolter ce que l’on a semé. On développe une forme de sagesse et de patience face à la vie, on en a tellement vécu! C’est aussi un âge où l’on perd plus de gens autour de nous, nos parents sont vieillissants. La vie devient encore plus précieuse. C’est une importante prise de conscience.

Dans votre conférence, vous parlez de l’importance de savoir écouter. Qu’est-ce que ça signifie pour vous?

J’ai remarqué que certaines personnes vont souvent répéter les mêmes choses, mais si on les écoute réellement, elles vont arrêter de répéter. Les personnes qui répètent, c’est souvent parce qu’elles ne sont pas entendues. Elles ont besoin d’être écoutées et validées. J’aime écouter les autres et être écoutée. De nos jours, on est toujours pressés. On se demande si ça va bien, mais on n’écoute pas vraiment la réponse. Pour être vrais, il faut d’abord être entendus. Sinon, on veut aller trop vite et on n’est pas dans le ressenti. C’est pourquoi savoir écouter, pour moi, c’est fondamental dans la vie.

De la même façon, quand on raconte une histoire et qu’on s’entend la raconter, on trouve des solutions. En entrevue, certaines personnes me disent: «Je viens de comprendre quelque chose!» Pourtant, elles le savaient, mais elles ne s’étaient pas entendues le dire.

Vous dites toujours avoir eu peur des regrets. En avez-vous?

Non, je n’ai pas de regrets. J’ai souvent entendu des gens dire: «Si j’avais su, si j’avais pu». Je me dis qu’on est capables de tout faire. Quand on veut faire quelque chose, on ne le fera pas nécessairement comme on veut, mais on peut au moins l’essayer. Je dirais que mon regret, si j’en ai un, est de ne pas avoir étudié en psychologie à l’université. Un jour, un conseiller en orientation au cégep m’a dit que j’avais de trop bonnes notes en mathématiques pour aller étudier en psycho. Je suis donc allée en sciences économiques. C’est le seul regret que j’ai parce que j’ai laissé quelqu’un d’autre prendre cette décision à ma place. J’aurais dû la prendre moi-même. Finalement, c’est ma fille qui a fait ce baccalauréat. Et avec Deux filles le matin, c’est un peu comme si j’étudiais en psychologie!

Dans votre livre La couveuse, vous racontez vos 133 jours d’immobilité pendant l’une de vos grossesses. Votre fils, qui avait 2% de chance de survivre, a 19 ans aujourd’hui. Comment cette expérience vous a-t-elle changée?

J’ai appris l’abandon, parce que quand tu es alitée, tu as beau penser à ta vaisselle, à ton ménage et à comment ta fille va s’habiller, tu ne peux pas bouger! Il faut donc lâcher prise et accepter que la Terre continue de tourner sans toi. Ça fait du bien de savoir que tu peux ne pas être là et ça marche quand même, même si tout n’est pas comme tu le ferais! Je suis contente d’avoir appris ça à 30 ans. Ça m’a fait du bien d’écrire ce livre. J’ai réalisé à quel point j’avais changé durant cette année-là.

Vous avez fait carrière en politique pendant plusieurs années. Qu’est-ce qui vous a amenée à devenir animatrice?

C’est vraiment un hasard. J’ai accordé une entrevue à Tout le monde en parle pour parler de notre vie, à Mario Dumont et moi. Pour la première fois, j’ai pu parler de moi et de différents sujets qui me tiennent à cœur. Je pense que ma franchise et mon authenticité ont retenu l’attention. Le lendemain matin, des producteurs télé m’ont appelée. Je me disais: «Ça doit être mon frère qui me fait une blague!» Je trouvais ça étrange, mais non, c’était de vrais producteurs! Ils m’ont demandé d’être collaboratrice à Deux filles le matin. Moi qui devais prendre une année sabbatique, je ne l’ai jamais prise! Et j’ai appris à devenir animatrice au fil du temps.

Ça fait déjà dix ans qu’on peut vous voir à Deux filles le matin. Pourquoi, selon vous, l’émission est encore aussi populaire aujourd’hui?

Toute l’équipe, on veut faire du bien à nos téléspectateurs. On a vraiment une belle relation avec eux. Chaque année, j’ai toujours peur de me répéter ou de ne plus être la bonne personne, mais quand je prends conscience de cette relation privilégiée avec le public, je me sens encore dans la famille. Quand on vient de finir une saison, je suis déjà en train de penser à la prochaine!

Dans la série Où es-tu?, vous vous penchez sur différents cas de disparition au Québec. Qu’est-ce qui vous a donné envie d’aborder ce sujet?

L’an passé, j’ai voulu me lancer dans un autre projet que Deux filles le matin, qui est rendu très confortable pour moi. Je voulais aller à la rencontre des gens sur le terrain. Dès que la boîte de production m’a parlé d’aller voir des parents de personnes disparues, j’ai tout de suite dit oui. On a élaboré le projet ensemble, on est allés le présenter à TVA, qui a accepté.

C’est un projet qui est vraiment dans la sensibilité, la fragilité et l’inconnu. On a travaillé très fort pour faire six épisodes, et on va en faire six autres pour la deuxième saison. Chaque histoire est indépendante des autres. Le seul point commun est la disparition, mais ce ne sont pas les mêmes circonstances et on ne parle pas aux mêmes intervenants. Où es-tu? a été fait avec beaucoup de sérieux. Je suis fière du résultat.

Vous avez trois enfants. Quand vous rencontrez les familles, j’imagine que vous pouvez très bien vous mettre à leur place.

Tellement! On pense avoir perdu notre enfant pendant une seconde et c’est la panique! Eux, c’est leur vie. Ils voient quelqu’un et se disent que ça pourrait être elle. C’est terrible! C’est un état de vigilance, un état d’alerte constant. Et ces gens-là ont été d’une générosité exceptionnelle avec nous. Ils étaient contents de parler de leur disparu. La balle était dans leur camp, on les a entendus et écoutés. Je suis tellement contente de faire une deuxième saison! On va laisser la chance à six autres familles de se faire entendre.

Merci pour ces confidences, Marie-Claude. Vous êtes belle à voir et à écouter !