
Les effets de la perte auditive sur le cerveau
Vous êtes-vous déjà demandé quels sont les effets d’une baisse d’audition sur la santé et les habiletés du cerveau?
Pourquoi les gens plus âgés s’adaptent-ils parfois plus difficilement au port d’appareils auditifs que les adultes plus jeunes? Cela pourrait avoir un lien avec le concept de
privation sensorielle.
La privation sensorielle peut être définie comme « une absence de stimulation des organes des sens par les agents extérieurs, ce qui est susceptible d’entraîner divers troubles ». Ainsi, lorsqu’un sens ne fonctionne pas bien, il envoie moins de stimulations au cerveau. Si on prend l’exemple de la perte auditive, une oreille endommagée envoie moins d’information au cerveau, qui est donc privé de certains sons. Il y a alors un risque que le cerveau devienne « sous-utilisé », car il est moins stimulé par son environnement.
Le cerveau n’aime pas les trous!
Des études montrent que lorsqu’on demande aux personnes ayant une perte auditive légère d’effectuer une tâche visuelle, il y a une activation (activité nerveuse) dans l’aire auditive du cerveau. De plus, lorsqu’on leur demande d’effectuer une tâche auditive, il y a moins d’activation dans la région auditive du cerveau. Cela signifie que lorsqu’on a une perte auditive et que le cerveau est privé de certains sons, les ressources cognitives liées à l’audition sont utilisées pour analyser l’information visuelle. On peut alors penser qu’avec le temps, le cerveau a de moins en moins de ressources pour analyser l’information auditive. C’est pourquoi il devient « sous-utilisé ». C’est aussi ce qui explique que les gens ayant une baisse d’audition de longue date aient de plus en plus de difficulté à comprendre la parole. Des études ont aussi démontré que le cerveau des personnes avec une perte auditive utilise également ses ressources auditives pour analyser l’information tactile, c’est-à-dire liée au toucher.
Une situation réversible
Heureusement, d’autres études montrent qu’il est possible de renverser la situation avec une intervention précoce. En effet, ces études suggèrent que le port d’appareils auditifs permettrait de stimuler les zones du cerveau devenues « sous-utilisées » en raison de la baisse d’audition. Cela est possible grâce au concept de plasticité cérébrale. Il s’agit de la « capacité du cerveau à créer, défaire ou réorganiser les réseaux de neurones et les connexions de ces neurones en fonction de l’environnement et des expériences vécues par l’individu ». En d’autres mots, le cerveau retrouve l’accès aux sons de l’environnement grâce aux appareils auditifs et recommence à utiliser plus de ressources (neurones) pour analyser l’information auditive. Deux facteurs importants sont toutefois à considérer : il faut agir rapidement après l’apparition de la perte auditive, et la réorganisation du cerveau est généralement plus efficace chez les personnes plus jeunes.
En résumé, une baisse d’audition de plusieurs années rend notre cerveau moins efficace pour comprendre la parole, car le cerveau devient moins stimulé par son environnement. Il est possible de renverser ce phénomène en portant des appareils auditifs, qui vont stimuler à nouveau le cerveau. Toutefois, la privation sensorielle ne doit pas être trop longue, et la plasticité cérébrale est généralement moins efficace avec l’âge.
Pour en savoir plus, n’hésitez pas à consulter un audiologiste.
Références :
BERGERON, F. Plasticité cérébrale et surdité : État des lieux. Communication présentée à la Journée scientifique Lobe. Québec, Canada. 2018.
SHARMA, A. Marion Downs Lecture: Brain Changes in Hearing Loss. Communication présentée au 29e congrès « Audiology Now! ». Indianapolis, États-Unis. 2017.